vendredi 5 décembre 2008

La Planta Rio Cullen, Total Austral (28-30 novembre 2008)



Ca y est, l'usine petrochimique est en vue ! Il est 9h du soir, le soleil est deja bas, et nous avons roule 80 km, dont 55 km sur piste. Nous sommes fatigues et heureux d'arriver a bon port. Quand soudain, je m'apercois que mon pneu arriere est a plat. Si pres du but ! Je demande a Caroline de partir annoncer notre arrivee a l'usine pendant que je repare. Une demi-heure plus tard, je suis de nouveau sur la route, l'usine en ligne de mire. Le soleil a disparu derriere l'horizon et les nuages rouges semblent bruler au-dessus de l'usine petrochimique : les couleurs sont fantastiques. Les lumieres de l'usine sont deja eclairees, une torchere brule, on distingue les lumieres des plateformes au large : ambiance...
A 10h, j'arrive enfin a l'entree. Caroline essaye tant bien que mal d'expliquer la raison de notre venue et c'est avec un grand soulagement qu'elle me voit arriver. Apres quelques explications, verification des passeports, nous visionnons une video presentant les consignes de securite. On ne rigole avec ca dans une usine qui traite plusieurs millions de metres cubes de gaz par jour. L'intendant de l'hotel, homme rondouillet, charmant et calme, vient nous chercher pour nous emmener a l'hotel, deposer nos affaires et prendre un repas bien merite.









Le lendemain, reveil a 7h pour prendre le petit-dejeuner en compagnie des travailleurs de l'usine. Tous regardent notre accoutrement d'un air amuse et perplexe. A 8h30, nous rencontrons Philippe Falguere, chef du site de Rio Cullen, qui nous accueille tres aimablement. Malgre son emploi du temps bien charge, il nous explique tous les rouages du site. Soudainement, il alpague un homme repondant au nom de Daniel Fernandez, super-intendant du site, pour preparer notre visite ainsi que 2 combinaisons de vol supplementaires. Nous lui demandons dans quel but, et il nous repond qu'aujourd'hui aura lieu le vol de surveillance des infrastructures en helicoptere et que nous serons a bord !
Il nous decrit ensuite l'usine en quelques chiffres. L'usine de Rio Cullen fut construite en 1980. 300 personnes y travaillent, dont plus de 95% d'argentins. Le personnel est double car le rythme du travail s'effectue par rotation de 23 jours a l'usine - 23 jours de repos. Il faut dire que travailler au bout du monde requiert une certaine exigence. L'usine exploite les hydrocarbures en onshore (sur terre) et offshore (en mer) sur 4 plateformes, et produit du petrole, du gaz et du butane-propane. Le systeme se reparti sur 2 sites distants de 20 a 30 km : Rio Cullen et Cañadon Alfa. Le site de Rio Cullen traite le petrole et les elements semi-legers, alors que Cañadon Alfa traite le gaz et le butane-propane. Les deux sites sont connectes par des centaines de km de canalisations.
Philippe nous explique egalement le fonctionnement des plateformes. Les hydrocarbures se presentent sous la forme de petrole et de gaz en differentes proportions. Ils sont contenus en profondeur dans la porosite des roches, souvent des sables qui jouent le role d'une eponge. Une quantite non negligeable d'eau y est souvent presente. Afin d'extraire les hydrocarbures, des puits de plusieurs km de profondeur sont creuses sous les plateformes. Ces puits ne sont pas forcemment verticaux, la technologie moderne permettant de changer la direction de perforation, voire de creuser des puits horizontaux : ce sont des puits devies. A Rio Cullen, un de ces puits atteint un gisement (reservoir) a 11,2 km de distance de la plateforme, ce qui constituait un record mondial a l'epoque de sa construction.
Philippe nous explique ensuite quelques techniques d'extraction du petrole, dont celle ingenieuse du "gas lift". En profondeur, les hydrocarbures sont sous pression et sous forme liquide, y compris le gaz. Le fait de percer un puits a l'interieur d'un reservoir de petrole ne suffit pas forcement a le faire remonter assez rapidement. C'est alors que l'ingenierie intervient. Les techniciens injectent dans le puits du gaz sous pression sous forme liquide. Ce gaz liquefie remonte le long du puits et sa pression diminue. Cette diminution de pression induit une transformation du gaz liquide en gaz "gazeux", c'est a dire que des bulles se forment. Ces bulles remontent alors vers la surface du puits en entrainant le petrole contenu en profondeur, ensuite recupere par les plateformes. Ce principe est exactement le meme que celui d'une bouteille de champagne.
Le melange petrole-gaz ainsi collecte est ensuite achemine a l'usine pour y etre traite. Afin d'eviter que le petrole ne se solidifie dans les canalisations, du triethyleneglycol est melange aux hydrocarbures des leur sortie du puits. Carlos nous fait visiter les installations de traitement pour comprendre leur fonctionnement. Le petrole est d'abord degaze et le gaz ainsi recupere est envoye au site de Cañadon Alfa pour y etre traite. Le petrole est ensuite achemine vers 3 separateurs de decantation qui separent le petrole, l'eau et le gaz residuel. L'eau est traite et le gaz est reinjecte dans les puits pour etre utilise de nouveau pour le "gas lift". Le petrole subit un traitement chimique qui permet d'extraire le triethyleneglycol, qui sera traite et reinjecte. Enfin, le petrole est stocke dans des tankers, puis sera achemine au large dans un bateau petrolier via une bouee. Toutes les etapes de transformations sont pilotees a partir d'une salle de controle. A la fin de cette visite, nous nous rendons compte que la chimie joue un role primordial dans le traitement du petrole.














Apres la visite, en route pour l'helicoptere. Nous enfilons des combinaisons pas tres confortables, puis nous montons dans l'appareil. C'est le bapteme d'helicoptere pour Caroline et une certaine apprehension se lit sur son visage. Je ne suis pas plus rassure qu'elle. Enfin, l'appareil se souleve, se penche en avant, et c'est le grand depart ! Nous survolons d'abord l'usine de Rio Cullen avant de nous diriger vers le large, vers les plateformes. Le spectacle est fantastique. Derriere nous, les falaises de la cote s'etendent a perte de vue alors que nous apercevons les premieres plateformes sous l'appareil. Nous apercevons du personnel qui travaille jour et nuit pour maintenir la production. Afin de maintenir un relai entre les plateformes, un bateau specialement equipe fait la navette 24h/24h. Bientot, nous survolons la bouee d'alimentation des bateaux super-tankers, colonisee par des loups de mer, cousins des lions de mer. A l'approche de l'helicoptere, ils sautent a l'eau apeures par le bruit de l'appareil. Nous effectuons plusieurs rotations afin de bien verifier qu'il n'y ait pas de fuite. Apres 1/2h de vol, nous atterissons finalement sur le site de Cañadon Alfa, ou Pedro mene la visite. En fin de journee, Carlos nous ramene a Rio Cullen en 4x4. Quelle journee !












Pour finir, les cuisiniers ont prepare l'asado du samedi. A notre grande surprise, nous constatons que l'alcool est autorise pendant les repas. Philippe nous explique qu'il s'agit d'une exception quasi-unique dans ce type d'installation, et qu'il avait ete lui-meme tres surpris, voire inquiet, a son arrivee il y a un an et demi. Mais il confesse qu'il ne se fait plus de souci car les argentins sont tres serieux et s'autoregulent des qu'ils sont au travail. L'ambiance y est tres conviviale et la vie tout confort : un baby-foot, une table de ping-pong, des billards, un gymnase, internet sans fil installe par les employes eux-memes, et une bonne ambiance pour federer le tout. Tout est fait pour que tout le monde se sente bien dans cette usine du bout du monde.