vendredi 26 juin 2009

Le Lithium d’Atacama (San Pedro de Atacama, Chili, 28/05/09)

Le mercredi 28 mai au soir, notre ami Dominique nous rejoint à San Pedro de Atacama, chez son ami César, ancien orpailleur reconverti en restaurateur. Dominique est géologue au gisement de potassium et de lithium situé au milieu du salar d’Atacama, et il a fait 2 heures de route depuis le gisement pour venir nous chercher. Les retrouvailles sont chaleureuses, et nous partageons un bon dîner ensemble.

Le lendemain matin, vers 6h, nous décollons tous ensembles en 4x4 en direction du salar. Il fait froid et le lever du soleil sur cette immense plaine de sel est magique, les couleurs étant féériques. Deux heures plus tard, nous sommes à l’entrée des installations. Au poste de contrôle, nous allons montrer patte-blanche, mais un imprévu nous arrête. Le gars de la sécurité demande à Dominique : « Les visiteurs ne peuvent pas rentrer sans certificat médical. Il y a quelques mois, un visiteur est décédé dans les installations, il supportait mal l’altitude ». En effet, nous sommes à 2500 m. Nous avions tout prévu, sauf ça !

A ce moment, le responsable de Dominique, Corado, un italien aux yeux clairs, la quarantaine, et les cheveux grisonnants, arrive en véhicule. Dominique et le gars de la sécurité lui expliquent le problême. « Vous savez d’où viennent ces gens-là ? », demande Corado au gars de la sécurité. « Ils viennent de traverser la Puna en vélo ! ». Corado prend alors son téléphone, et appelle le responsable de la sécurité. Cinq minutes plus tard, il nous dit avec un grand sourire : « Vous allez avoir droit à une petite visite médicale ».




Une fois la visite effectuée (2 minutes pour chacun de nous...), nous nous retrouvons tous dans les bureaux. Autour se trouvent les installations industrielles, ainsi que des montagnes de ce qui ressemble à du sel, d’un blanc éblouissant. Toute l’équipe nous accueille très chaleureusement.

Andrés, le deuxième responsable de l’équipe, nous explique le principe du gisement. « Le salar d’Atacama est une grande « cuvette » topographique, où viennent s’accummuler les eaux qui ruissellent des montagnes alentours. Les eaux dissolvent des minéraux dans les roches qu’elles traversent, et se chargent en sel, qui vient s’accummuler dans la cuvette. Quand l’eau ressurgit à la surface et s’évapore, le sel se dépose et forme une croûte, qui donne le salar. Mais sous cette croûte, il existe une nappe d’eau très concentrée en différents minéraux, dont du sel, des sulfates, du potassium et du lithium : ces eaux sont des saumures naturelles. Le principe du gisement est de pomper ces saumures et de les exposer dans des grandes piscines. C’est à ce moment-là que commence l’extraction : l’énergie solaire évapore l’eau, et les différents sels cristallisent et se déposent dans les piscines, puis collectés. » Tout le monde aura reconnu le principe des marais salants, simples et ne nécéssitant pas de traitement chimique lourd.







« Mais comment séparez-vous les différents minéraux qui précipitent ? »

Andrés nous répond que les minéraux ne précipitent pas tous en même temps. Dans un premier temps, les sulfates précipitent (sulfate de calcium, ou gypse). Ensuite, le sel (NaCl), ou halite, commence à précipiter. Cependant, ces produits ne représentent pas d’intérêt commercial. Ce n’est que par la suite et à la fin que précipitent les sels de potassium (KCl, ou sylvite), puis les sels de lithium (LiCl), qui sont récupérés est exportés. La production de potassium dans ce gisement est relativement modérée à l’échelle mondiale (800 000 t/an). En revanche, la production de lithium couvre un tiers de la demande mondiale avec 35 000 t/an, ce qui propulse ce gisement au rang de premier producteur mondial.

« Pourquoi le salar d’Atacama est particulièrement intéressant ? »

Corado nous répond alors. « Le salar est un site unique ! En effet, la concentration de Lithium dans les saumures est extrêmement élevée (2 g/l), ce qui est unique au monde. Dans les autres gisements, la concentration est dix fois moins élevée, et la production beaucoup plus lente. L’origine d’une telle concentration est à ce jour inconnue, mais nous sommes contents d’en bénéficier. L’autre atout est le climat : nous sommes dans région la plus aride du monde ! L’évaporation de l’eau y est donc très rapide. C’est pour ces deux raisons que nous sommes le premier producteur mondial de lithium, à un coût de production défiant toute concurrence. »

Après cet entretien, Dominique nous emmène visiter les installations. Malheureusement, la grande majorité nous est inaccessible pour des raisons de sécurité. Dominique nous explique ensuite que son travail est de comprendre la structure du sous-sol du salar, afin de prédire où se trouvent les réserves de saumure, et donc de potassium et de lithium.








Une fois la visite terminée, nous retournons dire au-revoir à toute l’équipe avant de partir. Corado saute de sa chaise et nous alpague : « J’ai un petit service à vous demander. Mon fils est passionné par la terre et les roches, et je suis sûr qu’il serait passionné par votre aventure. Pourriez-vous lui faire un petit salut amical que j’enregistrerai sur mon téléphone portable ? ». Nous répondons avec plaisir à sa requète, avant que Dominique nous reconduise au premier village pour prendre le bus qui nous mènera à San Pedro, la tête remplie de nouvelles connaissances passionnantes.

Plus d'infos (anglais et espagnol): http://www.sqm.cl/